La nouvelle génération


Photo prise à la bibliothèque du laboratoire Curie. Juillet 1930.
De gauche à droite, assis: Melle Perey, Mme Razet, Melle Archinard, Melle Cotelle
Debout: Yakimach, Grégoire, Melle Galabert, Tcheng, Frédéric Joliot-Curie.
© A.C.J.C. Fonds Curie et Joliot-Curie.


Dans l’entre deux guerre le Laboratoire Curie de l’Institut du Radium devient un des principaux laboratoires consacrés dans le monde à la radioactivité. Il compte quelques chercheurs qui ont traversé la guerre tels André Debierne* et Fernand Holweck*, mais il regroupe surtout des nouveaux venus, parmi lesquels d’assez nombreux étrangers et un certain nombre de femmes. Liste de chercheurs du laboratoire Certains sont « bénévoles » d’autres bénéficient de bourses diverses pour des durés variables. Beaucoup de chercheurs entrent au laboratoire avec un bagage de technicien ou d’ingénieur sans avoir fait d’études universitaires. Ainsi Marguerite Perey*entrée comme technicienne chimiste, sera la collaboratrice de Marie Curie. Ainsi Frédéric Joliot*, sorti ingénieur de l’Ecole de Physique et Chimie industrielle, entre comme préparateur particulier. Irène Curie*, qui avait secondé sa mère dans son travail pour la radiologie de guerre, est devenue préparatrice et bientôt assistante. Elle soutient sa thèse sur le comportement des rayons alpha dans la matière en 1925 et devient la plus proche collaboratrice de sa mère. C’est elle qui initie Frédéric Joliot aux méthodes de la radioactivité. Celui-ci complète ses études et entreprend une thèse sur l’électrochimie des radioéléments.

Conséquence de la reprise des contacts internationaux, les chercheurs du laboratoire Curie se tournent vers de nouveaux sujets. Parmi les chercheurs étrangers, Salomon Rosemblum*se fait bientôt remarquer avec la découverte de la structure fine des rayons alpha en 1929. On croyait jusqu’alors que les rayons alpha émis par un radioélément avaient tous exactement la même énergie.

Le chimiste Moise Haissinsky décrit ainsi l’enthousiasme de Marie Curie. Je l’appelai depuis la porte : « Excusez-moi Madame, le spectre montre six raies! »
Madame Curie se retourna brusquement, ôta ses lunettes, me regarda avec son plus beau sourire illuminant son visage fatigué, et dit : «  Six raies spectrales, c’est impossible, vous plaisantez certainement, Monsieur !  »
Mais comme elle savait que je ne plaisantais pas, elle ajouta : «  Bon, alors je vais tout de suite vous préparer une source radioactive encore meilleure », et aussitôt elle se mit au travail.