Une des plaques photographiques de Becquerel impressionnée, malgré le papier opaque à la lumière, par les rayons issus d’une des substances étudiées. On remarque en bas du cliché un blanc, en forme de croix de Malte. C’est l’empreinte d’une croix de cuivre insérée entre la substance radioactive et le papier enveloppant la plaque. Le cuivre est donc opaque aux rayonnements.
© A.C.J.C. Fonds Curie et Joliot-Curie.


La découverte :

A la suite de la séance de l’Académie, Henri Becquerel entreprend dans son laboratoire, des expériences pour rechercher si des substances phosphorescentes sont capables d’émettre des rayons X. Il dispose entre autres de cristaux d’un sulfate double d’uranyle et de potassium. Le 1er mars, il découvre que ce sel d’uranium émet spontanément un rayonnement invisible et pénétrant, différent des rayons de Röntgen et capable de traverser le papier noir très épais protégeant une plaque photographique. Becquerel racontera plus tard : « quelques unes de ces expériences avaient été préparées le mercredi 26 et le jeudi 27 février et, comme ces jours-là, le Soleil ne s’est montré que d’une manière intermittente, j’avais conservé les expériences toutes préparées et rentré les châssis à l’obscurité dans le tiroir d’un meuble, en laissant en place les lamelles du sel d’uranium. Le soleil ne s’étant pas montré de nouveau les jours suivants, j’ai développé les plaques photographiques le 1er mars, en m’attendant à trouver des images très faibles. Les silhouettes apparurent au contraire, avec une grande intensité. Je pensai aussitôt que l’action avait dû continuer à l’obscurité. »
La radioactivité naturelle 4
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La découverte des rayons uraniques* par Henri Becquerel*, en mars 1896, n’a pas été immédiatement reconnue comme une percée scientifique majeure. Il a fallu attendre, pour en mesurer la portée, que Pierre et Marie Curie découvrent deux ans plus tard le polonium* et le radium* dont le rayonnement est des millions de fois plus intenses que celui de l’uranium*. Le phénomène d’émission spontanée, dénommé radioactivité* par les Curie suscite dès lors un immense intérêt. Le prix Nobel de physique de 1903, attribué conjointement à Henri Becquerel et aux Curie reconnaîtra son importance.

Henri Becquerel, qui était professeur au Muséum National d’Histoire Naturelle, doit la découverte de rayons inconnus émis par l’uranium à un concours de circonstances et à l’excitation qui avait accompagnée, au début de 1896, la découverte par W.C. Röntgen* des rayons X*, notamment la radiographie de la main de Madame Röntgen. Les résultats de Röntgen et des clichés de rayons X furent présentés, à l’Académie des Sciences de Paris, le 20 janvier 1896, par Henri Poincaré* . Celui-ci fit l’hypothèse que l’émission des rayons et la luminescence* de la portion de la paroi de verre dont ils étaient issus étaient des phénomènes associés.

L’un des académiciens présents, Henri Becquerel, était justement un spécialiste de la luminescence. De retour au Muséum, il entreprend des expériences pour rechercher si des substances phosphorescentes sont capables d’émettre des rayons X. Dans le cours de ses investigations, il utilise des cristaux d’un sel d’uranium, un élément rare. Becquerel a alors la surprise d’observer la silhouette d’une croix découpée dans une feuille de cuivre, en l’absence de toute excitation préalable par la lumière du soleil. Les rayonnements invisibles mis ainsi en évidence lui semblèrent pouvoir être attribués à une phosphorescence* de durée de persistance infiniment plus grande que celle de la phosphorescence ordinaire.

Dès le 9 mars, il constate que les rayons « uraniques » sont capables de décharger les corps électrisés, une propriété qu’ils partagent avec les rayons X. Le 23 mars puis le 30 mars, il observe également que les éléments lourds absorbent davantage les rayons. Le 18 mai, il constate que les rayons sont dus à l’élément uranium. L’intensité ne semblait aucunement diminuer avec le temps. Le 1er mars 1897, il fait part de nouvelles propriétés de ces rayons uraniques.

Le 12 avril 1897, il publie une nouvelle note dans laquelle il observe que le rayonnement de l’uranium n’a pas décru depuis plus d’une année. H. Becquerel était heureux d’avoir pu ainsi établir une nouvelle propriété d’un corps naturel, l’élément uranium qui émet spontanément un rayonnement pénétrant et passe à un autre sujet de recherche.


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